C’est en France, dans les années 1930 – la décennie de la misère et des textes en prose –, que Marina Tsvétaeva, dans des appartements lugubres à Meudon, puis à Clamart et à Vanves, écrivit les trois textes composant ce recueil: Le Diable, Ma mère et la musique et La Mai-son du vieux Pimène. Trois textes qui livrent le motif obsédant de la vie de Tsvétaeva, dominée par les trois M: la Mort, la Mère, les Mots. La mort, qui rôde et fauche dans la maison d’enfance. La mère, impétueuse, géniale, inaccessible, qui voulut imposer à sa fille une vocation de musicienne. Les mots, incarnés par le Diable, à l’appel duquel l’enfant répondit comme Marc Aurèle à Dieu: «C’est à toi que je suis redevable du cercle enchanté de ma solitude, qui m’accompagne partout». Marina Tsvétaeva fait le récit de la fidélité à sa vocation avec ascétisme et lyrisme, exaltation et cynisme. C’est une prose froide et ensorceleuse, pieuse et vengeresse, au sortir de laquelle une seule question se pose: «Comment ça va la vie, après la lecture de Marina Tsvétaeva?» Linda Lê.